Crypto-monnaie : « Il faut aller à l’information, mieux connaître le marché des crypto-monnaies », Lamissa Barro, Docteur en économie

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Il n’est plus rare de voir, des Burkinabè investir en ligne. La crypto-monnaie gagne de plus en plus de pratiquants. C’est dans ce sens que filinfos.net a ouvert ses colonnes à Docteur Lamissa Barro, Dr en économie. Dans l’entretien, Dr Barro revient sur l’historique et les enjeux de la crypto-monnaie.

Filinfos.net : Définition de la crypto-monnaie 

Il s’agit de monnaies numériques reposant sur la technologie blockchain qui permet de vérifier les paiements et autres transactions en l’absence d’un dépositaire centralisé (sans nécessité de Banque centrale). La blockchain (chaîne de blocs) est une technologie qui permet de stocker et transmettre des informations de manière transparente, sécurisée et sans organe central de contrôle (sorte de gigantesque livre de comptes numérique). La base de données renferme l’historique de toutes les transactions effectuées entre ses utilisateurs depuis sa création. Chaque fois que quelqu’un veut consulter une transaction que le livre renferme, il faut le décrypter, ce qui demande des ressources électriques et informatiques. Décentralisation oblige, ce sont les utilisateurs qui sont mis à contribution pour valider les transactions. La crypto-monnaie a plusieurs autres appellations synonymes (crypto-actif, crypto-devise, monnaie cryptographique ou encore cybermonnaie).

Filinfos.net Comment est-elle née, et comment a-t-elle émergée ?

Les crypto-monnaies ont été introduites sous la forme actuelle en 2009.  Depuis lors, le marché des crypto-monnaies a évolué de manière spectaculaire. Mais déjà au début des années 80, le cryptographe américain David Chaum avait créé un système de monnaie électronique anonyme appelé eCash. La principale différence entre l’eCash et les crypto-monnaies est que l’eCash était centralisée (via des banques). Un logiciel sur ordinateur local de l’utilisateur stockait l’argent numériquement qui était signé cryptographiquement par une banque. L’idéologie derrière est de se défaire de l’autorité et des règles existantes, mais en ligne.

Aujourd’hui, plusieurs dizaines de millions d’investisseurs actifs négocient des bitcoins et d’autres crypto-monnaies (on en dénombre aujourd’hui plus de 5 000 crypto-actifs ou crypto-monnaies) sur plus de 100 bourses dans le monde.

Filinfos.net : Le phénomène semble prendre du terrain qu’est-ce qui peut expliquer ce cela ?

La monnaie numérique est apparue comme une alternative présentant des avantages certains, du moins à court terme. Elle permet, notamment, de transférer de l’argent à l’international en un temps record et à très faible coût, comparativement au système traditionnel. De plus, des investissements dans ces crypto-actifs ont eu des rendements jamais égalés sur le marché, suscitant le comportement mimétique des agents économiques. Enfin, le phénomène inflationniste dans plusieurs monnaies ‘‘traditionnelles’’ fait de ces crypto-actifs de véritables devises de refuge.

Lamissa Barro, Dr en économie

Filinfos.net : quelles peuvent être les avantages ou forces de la crypto-monnaie ?

Les avantages résident dans ce qui est évoqué à la question n°3 pour justifier l’ampleur du phénomène.

En plus, l’une des caractéristiques qui attire tant d’adeptes enthousiastes vers le secteur de la monnaie virtuelle est le fait qu’elle n’est pas sujette au contrôle gouvernemental.

Aussi, la décentralisation des applications et donc l’émergence des crypto-monnaies servent principalement une chose que ne peuvent pas offrir les autres : la résistance à la censure, mais aussi le chiffrement des données. Certains crypto-actifs promettent même un anonymat total.

Filinfos.net : quelles peuvent être les inconvénients ou faiblesses de la crypto-monnaie ?

Le Bitcoin et les autres crypto-monnaies ne servent pas dans les transactions dans plusieurs pays. Absence d’une fonction, qui pour certains, ne fait pas des crypto-actifs une monnaie à part entière. De plus, la fiabilité des crypto-monnaies demeure toujours le principal point faible. L’évolution du prix sur le marché est extrêmement importante, il y a une très forte volatilité. De par le passé, après une forte envolée du bitcoin, l’on a pu assister à une très forte baisse. C’est pour cela qu’il faut être extrêmement prudent.

Des comportements illicites généralisés peuvent aussi être observés sur les marchés des crypto-monnaies. Des pirates peuvent exploiter une vulnérabilité de l’application pour détourner des fonds des utilisateurs. Une forte corrélation pourrait exister entre ces attaques et la volatilité des cours des crypto-monnaies.

Enfin, l’absence de réglementation pourrait garantir un terrain fertile aux pratiques des arnaqueurs, mais aussi pour les flux financiers illicites. 

Filinfos.net : Quels sont les enjeux de la crypto-monnaie dans un pays comme le Burkina Faso ?

Les investisseurs burkinabè sont dans la tendance mondiale car les marchés de crypto-monnaies présentent des opportunités pour les spéculateurs. La base nationale d’investisseurs va certainement continuer à croître, avec un accès de plus en plus accru à l’internet et le comportement mimétique. Dans le monde en développement, les comportements individuels d’investissement sont souvent fortement corrélés, car tous ne font pas une analyse fondamentale des marchés, mais se laissent emporter par un effet de mode. Le défi majeur pour différents pays reste la régulation du secteur de la crypto-monnaie, d’où le risque institutionnel que les investisseurs devraient intégrer dans leurs anticipations. Dans ce sens, le Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers (CREPMF) de l’UEMOA a déjà interpellé sur la nécessité de vigilance en ce qui concerne le trading des crypto-monnaies.

Dans un pays sous emprise des conflits violents comme le Burkina Faso, des inquiétudes concernent le rôle des crypto-monnaies dans la facilitation des flux financiers illicites tels que le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, les ventes illégales d’armes et le financement du terrorisme ; ce qui pourrait militer pour la mise en place d’une réglementation.

Filinfos.net Comment on peut expliquer scientifiquement ce phénomène ?

La monnaie, quel que soit sa forme, est plus sociale et institutionnelle que scientifique. Toutefois vous trouverez satisfaction dans le processus de génération à travers la blockchain comme développé plus haut.

Certaines personnes lient crypto-monnaie à un système d’arnaque, d’autres à une histoire satanique. Qu’en dites-vous ?

Les crypto-monnaies ne sont pas, à la base, un système d’arnaque ou tout autre. Il s’agit d’actifs cessibles sur un marché dont les cours (comme tout autre actif) Il faut aller à l’information, mieux connaître le marché des crypto-monnaies subissent de fortes fluctuations (risque élevé), d’où l’intérêt des spéculateurs. Toutefois, dans un contexte où beaucoup de personnes ne maitrisent pas le contour du phénomène, une arnaque peut se développer autour.  

Quel avenir pour elle dans un pays comme le Burkina Faso ?

Parler de l’avenir des crypto-monnaies c’est s’attendre à des mutations, notamment sur le plan institutionnel et réglementaire. Aussi, la digitalisation de la monnaie a-t-elle des avantages certains que l’autorité monétaire (BCEAO) voudrait exploiter et l’on pourrait assister à la mise en place d’une crypto-monnaie publique, comme c’est déjà le cas dans certains pays.

Quels conseils à ceux qui la pratiquent, ceux qui ont peur, et ceux qui ne s’y intéressent pas ?

Les crypto-monnaies restent des actifs de spéculation, avec une forte volatilité des cours, pouvant générer des retours sur investissement assez importants, comme aussi entraîner des pertes colossales ; ceux qui investissent sur ces marchés sont donc des risk-lovers et doivent le faire librement sans pression d’une tierce personne. Des gens gagnent, des gens perdent, et ça c’est le marché. Le risque peut toutefois être accentué par l’activité des pirates exploitant une faille du système.

Pour ne pas être également exposé aux arnaqueurs, l’investisseur ne doit pas passer par tierce personne pour effectuer des opérations en son compte, sans avoir lui-même connaissance du fonctionnement du phénomène.

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