« Sauf l’insensé peut vendre sa vie pour de l’argent. Nous savons que nous risquons nos vies, nous courons la prison. Mais on sait que nous serons récompensés par Dieu » TD1, auteur d’attaques terroristes
Ouvert le 9 août 2021 au Tribunal de Grande instance Ouaga II, le procès des présumés terroristes se poursuit. Pour le mardi 10 août, deuxième jour du procès, deux dossiers étaient à l’ordre du jour. Concernant le premier, deux présumés terroristes ont été condamnés chacun à 20 ans de prison ferme avec 15 ans de sûreté et à payer solidairement des dommages et intérêts d’une somme de 2 975 074 F CFA et 758 000 FCFA à la partie civile composée de deux enseignants.
A la barre, TD1 âgé de 38 ans, père de trois enfants et TD2 âgé de 29 ans célibataire sans enfant ont comparu. Ils sont accusés d’association de malfaiteurs en lien avec le terrorisme, de détention illégale d’armes à feu et de vol aggravé et de dégradation volontaire de biens en relation avec une entreprise terroriste.
Les faits remontent en début mai 2018 lors d’une attaque du camp des Koglweogo (groupe d’auto-défense) de Gendbila et d’un incendie de l’école primaire de Bafina dans la commune de Barsalogho, dans la région du Centre-nord. TD2, célibataire sans enfants relate sa version des faits à la barre. Il explique qu’il a été envoyé avec 7 autres personnes de son groupe pour mener une attaque contre un camp de Koglweogo sur l’axe Barsalogho Foubé. Il précise que consigne a été donnée par sa hiérarchie de ne pas tirer sur les Koglweogo s’ils ne possèdent pas d’armes, mais, s’ils se trouvent qu’ils sont munis d’armes alors que « le meilleur gagne ». Une mission qui sera impossible pour les deux détenus, à savoir TD1 et TD2.
Accusé, lèves-toi et parles !
C’est TD1 qui donne d’abord ses explications au juge. En effet, ils ont d’abord pris d’assaut la cour du directeur de l’école. « Quand nous sommes arrivés, le directeur de l’école s’est mis à réciter les versets du coran. Et c’est là que je lui ai ordonné de se taire, et l’un des nôtres à donner un coup de pieds au directeur. Nous avons pris la moto du directeur de l’école et nous lui avons dit que si nous revenons trouver que lui et ses enseignants continuent de dispenser les cours autres que l’arabe à l’école, cela ne sera pas simple pour eux », a relaté le prévenu sans aucune difficulté, un peu comme s’il se souvenait de tous les détails. Outre cela, son groupe a également rendu visite à une institutrice de l’école et l’a dépouillé de sa moto, et ensuite incendié l’école primaire.
TD2, à la barre
L’un après l’autre les deux prévenus se sont succédés sur le banc des accusés. Après les explications de TD1, ce fut autour de TD2 de raconter ses «faits». La chaire de poule, il y en avait lorsqu’il a retracé les évènements et avec une similitude que ceux Contés par TD1.
Le parquet a relevé que ces deux présumés terroristes ont été arrêtés par les Koglweogo qu’ils attendaient attaqués.
La pomme de discorde entre le parquet et les deux prévenus
Les deux prévenus reconnaissent les faits qui les sont reprochés sauf un, celui du vol. Oui, ils acceptent tous les autres chefs d’accusation, mais nient avec une forte énergie avoir dérobé des biens. On aurait dit qu’il y avait plus de valeur à être terroriste que voleur. « Nous ne sommes pas des voleurs », a déclaré TD2 d’un ton ferme au juge, quand on lui a posé la question à savoir s’il reconnait les faits de vol. Et au juge de relancer : avez-vous pris les biens des enseignants avec leurs consentements ? Il répond par la négative ? « Mais comment vous appelez prendre un bien de quelqu’un sans son consentement ? » a poursuivi le juge au siège. Réponse du détenu : « quand deux parties sont en guerre le plus fort peut s’accaparer du bien d’autrui sans crainte ».
« Terroristes »et fiers, Dieu fera le reste…
Les deux combattants d’Ansarul devant le tribunal ne morfondent pas sur leurs sorts. Pour eux, ils ont fait l’œuvre de Dieu et leur arrestation fait partie des contraintes de leur « sacerdoce». A la question de savoir pourquoi ils se sont ralliés à Ansarul Islam, les deux présumés sont tous d’accord : « ce n’est pas pour l’argent ». Et de poursuivre que sauf « l’insensé peut vendre sa vie pour de l’argent ». « Nous savons que nous risquons nos vies, nous courons la prison. Mais on sait que nous serons récompensés par Dieu ». Acculés sur la question du profit qu’il tire dans le groupe Ansarul Islam, ils lâchent, « sur terre, il n’y a que la mort comme gain » avant de poursuivre que ce groupe leur permet de prêcher l’islam. Chose qui selon-lui, l’ouvrira les portes du paradis.
Aussi TD1 a confié au parquet, que leurs objectifs ne sont pas de terroriser qui que ce soit. « Nous ne voulons pas qu’une personne souffre », a-t-il lâché. Pour lui, tous doivent être de l’islam et la charia doit être appliquée. « Par exemple si c’était la charia, nous serions jugés en fonction du coran », a insinué TD1. C’est parce que les gens ne veulent pas suivre les prescriptions du coran qu’il y a problème.
Quant à TD2, lui affirme, que la mission d’un homme c’est de faire propager l’islam et lutter pour l’application de la charia. « Et c’est ce que nous faisons ». Ainsi, ils disent défendre l’islam en combattant l’Etat qui n’applique pas la charia. « C’est pour cela que nous attaquons les représentations de l’Etat surtout l’école classique ». Mais à ce niveau, il émet une réserve : « On attaque uniquement ceux qui nous ont déclaré la guerre ». « Mais pourquoi avoir attaqué l’école de Bafina» a ainsi demandé le juge. Les raisons de cet état de fait résident au fait que certains enseignants questionnent les écoliers et taxent certains enfants de fils de terroristes, qu’ils s’en ont pris à ladite école.
Ne plus retourner à Ansaroul Islam? Pas question !!!
L’amour pour Ansaroul Islam ne semble pas s’être estompé pour ces deux, malgré les trois années passées derrière les barreaux. Pour preuve, à la question du juge de savoir s’ils accepteraient ne plus retourner à leurs anciennes vies à savoir lutter pour l’instauration de la charia, TD2 lui a affirmé qu’il ne saurait répondre à cette question. TD1, lui défend la charia en disant que c’est ce qu’il faut aux peuples. De toutes les façons, ils ne croient pas à une éventuelle liberté. « Nous savons qu’on va nous tuer, il y a un cas similaire dans le coran », a lâché TD2 dans un air plus ou moins calme.
Les deux présumés écopent de 20 ans de prison…
Pour la partie civile notamment le directeur de l’école et de la maîtresse, le pire a été évité mais les conséquences demeurent. Ils disent tous avoir pris des prêts pour acheter de nouveaux engins, pour leurs soins et pour le matériel endommagé. Le directeur estime les dégâts y compris les intérêts avec la banque, plus ses soins à 4 millions de Francs CFA. Quant à la maîtresse, elle réclame environ 900 000 FCFA comme dommages et intérêts.
Au cours de ses réquisitions, le procureur a soutenu que les actes des deux présumés terroristes n’avaient pas un lien avec la religion qu’ils prétendent défendre au prix de leur vie. Cependant il a requis qu’ils soient condamnés chacun à 20 ans de prison ferme avec 15 ans de sûreté et à payer solidairement des dommages et intérêts aux enseignants.
Des réquisitions dont les présumées terroristes n’en demandaient pas mieux. TD1, remercie le parquet pour le procès et déclare : « ce que Dieu fait est bon ». Au finish, les deux présumés ont été condamnés chacun à 20 ans de prison ferme avec 15 ans de sûreté et à payer solidairement des dommages et intérêts d’une valeur de 2 975 074 F CFA et 758 000 FCFA à la partie civile composée de deux enseignants.
La deuxième audience du jour a été ramenée au jeudi 12 août 2021. Le procès se poursuit mercredi 11 août à 8 heures avec d’autres dossiers.
E.G
Apps Mobile
Derniers articles par: Apps Mobile (voir tous)
- Le gouvernement burkinabè adopte des réformes pour renforcer la microfinance et la transparence des marchés publics - mercredi le 30 octobre 2024
- Burkina : Les femmes musulmanes réaffirment leur engagement dans la lutte contre le terrorisme - vendredi le 18 octobre 2024
- Burkina/Terrorisme : un poseur d’engins explosifs interpellé par l’armée (AIB) - samedi le 12 octobre 2024